Bungalows tout confort
Droit devant, l'île aux pirates. L'île
Sainte-Marie. La mer est relativement calme. Sur le toit du bateau, la
vue est imprenable mais le soleil cogne fort sur les crânes. Voyage
vers "Nosy Boraha" en malgache...
Fine et étroite
bande de terre longiligne, l'île de Sainte-Marie se dévoile
peu à peu. La végétation semble dense. Arnaud a sorti
ses crayons. L'il droit fermé, son crayon de bois (à
papier pour les non bretons) à la main, son bandana rouge dans
les cheveux et sa barbe broussailleuse, on dirait un pirate ! À
mi-parcours, le bateau s'arrête mystérieusement. Un coup
d'il à l'arrière. Regard d'abord intrigué.
Entassés comme des sardines, Cédric et Julie (les 2 autres
membres de l'équipe) ont l'air assoupis. Les autres passagers aussi.
Regard étonné ensuite. Sur tribord, on s'active. Deux malgaches
remontent un joli poisson multicolore. L'équipage pêche à
la traîne. Pas de petit profit ! Une belle photo ratée tant
l'équipage est rapide. Le reste de la traversée se fera
sans histoires ni jolis poissons multicolore. Tant pis pour la photo
Les quais du port de Ambodifotatra sont noirs de monde.
Visiblement, certains passagers sont attendus dans la " capitale
" de Sainte-Marie. À ma descente, me voilà happé
par 4 gus. Chacun me vante son hôtel, un album photo à la
main. Le " vazaha " est courtisé. Quatre " vazahas
", c'est une aubaine. Si en plus, les 4 n'ont réservé
aucun hôtel, c'est une bénédiction ! J'essaye tant
bien que mal de prendre des clichés de ce tohu-bohu. J'aperçois
Arnaud lui aussi bien entouré. Julie et Cédric ont disparu,
noyés dans la meute sûrement. Une horde de démarcheurs
à leurs trousses. Mon appareil photo n'effraie pas les vendeurs.
Leur argumentaire est bien rôdé. " Bungalows tout
confort - eau courante - moustiquaire - WC - électricité
-
". Bien évidemment, chaque hôtel dispose
d'un "décor paradisiaque". Les " vendeurs d'hôtel
" se démènent pour vanter les mérites de leur
paradis. Alors, farniente au Sud ? Au Nord ? En centre-ville ? Le vendeur
de l'hôtel du centre-ville n'est pas chanceux. Son hôtel de
l'autre côté des quais ne paie pas de mine et ne soutient
pas la comparaison par rapport aux autres photos des hôtels que
me présentent ses " collègues ". " Mais
vous serez au centre de tout. Pas de longs trajets donc ! " m'assure-t-il.
Un vendeur jeune et bavard me colle littéralement aux basques.
Les photos de son album ont bien jauni par rapport à celles flambantes
neuves du moustachu grassouillet qui me harcèle littéralement.
J'ai beau m'écarter des quais, les vendeurs me suivent comme des
sangsues, sauf un à l'écart. Il s'appelle Alain. Son offre
détonne. Et lui n'en fait pas des tonnes. " Vous serez
logé dans un bungalow chez l'habitant. Ni eau courante, ni électricité
". Sa proposition me séduit mais j'ai perdu les autres.
Face à mon hésitation, c'est une véritable surenchère.
Je crois que c'est la même chose pour mes compères
Finalement, ça sera le Nord de l'île,
réputé plus sauvage. Le vendeur longiligne à
la casquette a remporté la mise. Il est aux anges. Rapidement les
autres vendeurs s'écartent. Direction le taxi du gagnant. "
Navette gratuite " en Peugeot 305 bleue aux sièges colorés
et bigarrés. La sortie de la " capitale " est rapide.
La route est ensuite rapidement défoncée. Assis sur le siège
passager, le paysage se dévoile sous mes yeux délicieusement.
À gauche, la route touristique mais cahotique est magnifique. Mon
esprit s'égare. À la traversée de villages et d'hameaux
d'un autre siècle, mon esprit divague. J'ai la sensation de remonter
le temps. . Le chauffeur muet. Le vendeur assis avec les autres à
l'arrière lui est bavard. Demain, il y a les élections municipales.
On attend même un ministre natif de l'île. J'écoute
distraitement. Mes yeux balayent consciencieusement le paysage. Je ne
perds pas une miette du spectacle malgré la fatigue qui me submerge.
" Hôtel le rocher ", nous y voilà ! Un court chemin
cabossé. Un bungalow principal juste en face. Juste derrière
la plage et un rocher au milieu. Le décor est paradisiaque. Les
eaux transparentes. Un appel à la baignade. Notre chauffeur et
notre vendeur nous quittent rapidement. Très satisfaits. Moi qui
croyais naïvement qu'ils travaillaient pour l'hôtel. J'apprendrais
plus tard qu'ils sont payés à la commission. Sur le pas
de la porte, c'est Lucien qui nous accueille. Une blouse par-dessus un
short et un tee-shirt crasseux, des tongues au pied et un large sourire.
Une bonne bouille. Notre " majordome " inspire d'emblée
la sympathie. Il nous conduit prestement à nos bungalows. Madame
Émilienne, la patronne, est partie faire une course. Elle ne devrait
pas tarder. Je m'affale sur le lit en me promettant de rapidement me lever
pour aller me baigner. Avant d'arriver au bungalow, j'ai chippé
au passage un masque et un tuba. Juste quelques minutes fermer les yeux
avant de plonger dans les eaux bleu azur et translucides de Sainte-Marie.
Juste en contre bas de notre bungalow. À une poignée de
mètres. Du pur bonheur
Stéphane Dugast
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