
Ce n'est
pas seulement le souvenir des manguiers de la place principale du petit
port, ni ce petit bout de jungle déjà perdu dans l'océan,
ni ces pêcheurs éparses rencontrés aux abords d'une
plage paradisiaque, qui donnent une atmosphère si étrange
à l'île de Sainte-Marie. A portée de vue à
l'est de Madagascar, cette langue de terre de 60 kilomètres sur
à peine 15 porte encore en elle les stigmates d'une étrange
occupation étrangère : celles des pirates qui, aux XVIIe
et XVIIIe siècle notamment trouvèrent dans ces ravinala
en bord de mer un havre de paix, propice à la retraite méritée
pour certains, ou aux rêves de grandeur des autres. Au début
du XVIIIe, on dénombrait plus de 1 000 pirates à Sainte-Marie
et dans les localités de la côte. Anglais, français,
américains, des pirates du monde entier posent leurs pénates
sur Sainte-Marie. Une aura qui tient aussi sans doute au poids de ces
flibustiers dans le destin de l'île. Comme ce caporal La Bigorne
qui, en épousant la princesse Bety, héritière de
l'île et déjà petite-fille d'un pirate anglais et
de la fille d'un chef malgache, céda Sainte-Marie à la France
en 1750, lui conférant un statut spécial qu'elle a gardé
jusqu'au XXe siècle. L'île aux Forbans et le cimetière
des pirates sont les traces encore palpables de ce passage. A la tombée
du jour les stèles rendent vie, le temps d'une épitaphe
à ceux qui ont foulé ce sol.
Julie Desné
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